Guy Gilles   Cinéaste français (1938 - 1996)
Guy Gilles

" Dans tous ses films, qui sont des films d'amour et de tourment, les personnages luttent contre le mal de vivre, la fuite inexorable du temps, veulent faire de l'absolu avec de l'éphémère. Et même s'ils ne racontent pas la vie de Guy Gilles, ils sont autobiographiques; une suite de rencontres, les blessures inguérissables d'une passion récurrente. "

Jacques Siclier

Critiques

Par M. DANZAS : Roger Stéphane a beaucoup d'astuce

Quelqu’un s'est écrié, devant un certain tableau de Gustave Courbet : Tableau, que me veux-tu ? On pourrait s'exclamer aussi, à propos de Pour le plaisir, de Roger Stéphane et Roland Darbois : « Emission, que me veux-tu ? » Je crois qu’elle aurait voulu, en quelque sorte, nous intimider. Roger Stéphane a, en effet, beaucoup d'astuce. Il montre des choses parfois futiles, ou déjà connues, ou déjà vues, et s’efforce de nous faire croire qu’il « révèle », ou, du moins, qu’il nous fait entrevoir le sens des choses. Et, si l’on n'entrevoit pas, il veut nous faire croire qu’on n'est pas dans le circuit. Il nous a présenté, à cet effet, des mécaniques construites par M. Carelman et inspirées par « Le voyage dans la Lune » de Cyrano de Bergerac, qui évoquaient surtout des sculptures abstraites; un coiffeur en Rolls-Royce, qui coiffe les voyageuses entre Orly et Paris et qui les a déjà coiffées dans une bande récente d'actualités; des mouvements de danse classique et une longue séquence, intitulée Pop-âge, où l'on voyait, dans un désordre savant, des affiches, des plans moyens de filles en uniforme Courrèges, des zèbres, des gros plans de filles coiffées à la Jeanne d'Arc, des gros plans de garçons coiffés à la Musset, le jeune acteur Clémenti qui, lui, porte des anglaises, un lion, des sculptures bariolées de Nicky de Saint-Phalle, celles de César (décidément, la sculpture était à l'ordre du jour) et il nous a fait entendre les professions de foi d’un barman : « Je veux arriver... », d'un poète : « Je veux rendre hommage à André Breton », et des disques des Beatles (…)


POUR LE PLAISIR : Une salade américaine

On se pose de plus en plus question : pour le plaisir de qui? Je ne voudrais pas être méchant pour Roger Stéphane et Roland Darbois mais, vraiment, à qui font-ils un clin d'œil lorsqu'ils laissent passer dans leur émission une rubrique comme Pop'Age ?
A quels intellectuels faisandés? A quels initiés capables de lire entre les images ? Une réflexion hautement philosophique sur la société de consommation et la jeunesse aux cheveux longs cela? Allons donc.
Si on les coupe en quatre, ces cheveux, c'est pour paraître « dans le vent ». Le sujet est à la mode. Le style se veut moderne Une salade russe ou américaine de Godard, d'Averty, de Dim-dam-Dom, de la presse dite de luxe. Ce que Clive Donner (Quoi de neuf, Pussy Cat ?) fait pour le cinéma, les journalistes de Pour le Plaisir l'ont voulu faire ici, pour le reportage. Mais comme ils ont moins de métier e donc moins de roublardise, cela donre un beau fatras d'idées confuses dans lequel s'étalent ingénument les goûts personnels. La plus jolie fille est vue par un regard misogyne. Le moindre éphèbe inexpressif est mis en valeur comme une statue grecque. Le reste n'est que littérature et quelle littérature! Les braves gens n'y voient que du feu et il est vrai qu'à cette heure-là, ils sont couchés. Le tout est prétentieux et ridicule.
Pour racheter cette erreur (mais depuis quelque temps, le magazine glisse, de façon inquiétante, vers ce ton-là), il y avait un reportage de Michel Mitrani sur Rosella Hightower. Tant dans l'entretien qu'il eut avec elle que dans les images prises à son école, Mitrani s'est efforcé de capter l'âme de la danse. Il y est parvenu, non pas seulement par sa maîtrise technique, mais par son intelligence des êtres.